Dans les premières années de la IIIe
République (1871-1900), la ville d’Amiens se développe et
connaît une renaissance culturelle favorisant les arts,
renouveau auquel Émile Maillard apporte sa contribution dans le
domaine des arts graphiques. Il devient membre de la Société des
Amis des Arts du département de la Somme et le restera jusqu'en
1913. En , il participe, à
33 ans, à l’exposition annuelle de peinture et de dessin
qu’organise cette Société et obtient la mention
« Honorable ».
Le décès de sa mère, survenu en affecte beaucoup l’artiste, et son père l’encourage alors à s’éloigner du domicile familial pour peindre les sujets de bord de mer qu’il affectionne, dans la baie de Somme et sur la côte picarde et la côte d’Opale, d’Étaples à Dunkerque. Lors de ses voyages, il est assisté par Marie Frion (1855-1934), jeune employée de l’entreprise familiale qu’il épouse à Amiens le . Trois fils naîtront de cette union : Marcel (1889-1945), Maurice (1892-1971) et Pierre (1893-1915).
En 1884, Émile Maillard devient Sociétaire
des artistes français et expose désormais régulièrement ses
œuvres à Amiens, puis à Paris. En juillet 1885, à 39 ans, il
obtient une médaille d’argent à l’exposition d’Amiens avec trois
œuvres exposées : Marée descendante, Entrée de
ferme et Cour de ferme. En 1886, il est admis
comme élève à l'Académie Julian sur la recommandation d'Émile
Renouf. En 4 et 1889 (Exposition
Universelle), il participe au Salon de la Société des artistes
français à Paris et obtient deux fois la mention
« Honorable », notamment pour le tableau intitulé Les
derniers secours conservé au Musée de Picardie à Amiens.
Jusqu’à la fin du siècle, Émile continue d’exposer et obtient
plusieurs récompenses, en particulier une médaille de bronze au
Salon parisien de et une médaille
d’or à Amiens.
Le 7,
Émile Maillard est nommé Peintre Officiel
de la Marine, nomination que le Ministre de
la marine, Édouard Barbey,
lui annonce le 20 mai par l’intermédiaire d'Albert
Dauphin, Sénateur de la Somme qui a appuyé
la candidature de l’artiste de sa recommandation.Après le décès
de leur père survenu en , Émile et sa
sœur Clara vendent l’entreprise familiale de tissus, ce qui
procure au peintre la rente financière lui permettant de
continuer à se consacrer exclusivement à son art. Il se fait
construire dans le quartier de Saint-Acheul à Amiens, une belle
demeure où il installe son atelier.Depuis 1891, la France et la
Russie tsariste se sont rapprochés pour faire contre-poids à la
Prusse. L’évolution positive des relations diplomatiques entre
les deux pays aboutit à l’Alliance franco-russe, accord de
coopération militaire ratifié le par le gouvernement français. Dans ce cadre, une visite officielle des
souverains russes en France est organisée pour . En sa qualité de Peintre Officiel de la Marine,
Émile Maillard informe le cabinet du Ministre de la marine de
son intention de prendre comme sujet d’un prochain tableau
l’arrivée à Cherbourg des yachts impériaux du Tsar, l’Etoile
polaire et le Standart escortés par les fleurons
de la marine de guerre française. Le , le Cabinet du Ministre confirme son
accord et invite le vice-amiral Henri Rieunier, Commandant en
chef, Préfet du 1er arrondissement
maritime, à donner au peintre toutes facilités pour
l’accomplissement de son projet. Ayant exécuté son tableau
intitulé L’Escadre de la mer du Nord à Cherbourg et
représentant cette escadre escortant le yacht impérial à
l’arrivée du tsar Nicolas II et de la tsarine Alexandra
Fiodorovna de Russie en rade de Cherbourg le , Émile en
fait offrande au Ministre de la marine pour l’Hôtel du
Ministère. L’hommage est accepté par le Cabinet du Ministère
en date du . Lors de la
seconde visite officielle en France des souverains russes, en
1901, Émile peint deux nouvelles toiles commémorant l’arrivée
du yacht impérial russe Le Standart à Dunkerque le ,
Cassini
Le Cassini et Le Standart passent la revue de l'escadre à
Dunkerque et Le Cassini portant le Président de la
République (Le Cassini est le navire à bord
duquel le Président de la République Émile Loube a embarqué
pour accueillir en mer le Tsar Nicolas II).
Le , à 52 ans, Émile Maillard est nommé Officier
d’académie par arrêté du Ministre de l’instruction publique et
des Beaux-Arts.Dans les premières années du XXe siècle, la rente
financière issue de la vente de l’entreprise familiale
s’épuisant, Émile doit vendre sa demeure du quartier
Saint-Acheul à Amiens. Il s’installe avec sa famille au n° 25 de
la rue Voiture à Amiens, où le couple et leurs trois fils sont
recensés en 1906. Le peintre est alors âgé de 60 ans. Les vingt
dernières années de sa vie sont marquées par une réduction de
ses ressources financières et les bouleversements dramatiques
entraînés par la Première Guerre Mondiale. Le , Pierre
Maillard, le plus jeune des enfants du couple, lieutenant Saint-Cyrien au 2e bataillon du 72e régiment
d’infanterie âgé de 21 ans est tué au combat en Argonne lors de
l’offensive de Bois-Volante. Il est cité à l’ordre de la IIIe
armée et reçoit la Croix de guerre et la Légion d’honneur. La
ville d’Amiens est très proche du front ce qui contraint Émile
et son épouse à un exil à Morlaix (Finistère) au début de 1917.
Le , Émile, âgé de
70 ans, apprend que Marcel, son fils aîné, sous-lieutenant au 272e régiment
d’infanterie a été fait prisonnier. Libéré après l’armistice, ce
dernier sera décoré de la Croix de guerre et honoré de la
Fourragère.
Pendant son exil à Morlaix, Émile Maillard ne cesse pas de peindre malgré son âge (plus de 70 ans). Il est notamment en relation avec Monsieur Picot, propriétaire de la galerie d’exposition permanente de tableaux de l’École française opérant à Paris (39, rue Damrémont) et à Zurich, galerie à laquelle il vend plusieurs dizaines de toiles. Il accorde à cette galerie une exclusivité pour la vente de ses oeuvres en Suisse en échange de l’intermédiation de cette dernière auprès du Bureau de secours de Berne pour la transmission de colis à son fils Marcel prisonnier en Allemagne contre rémunération prélevée sur le produit de la vente de ses tableaux et dans l’espoir d’obtenir le transfert du prisonnier en Suisse. Les commandes de la galerie portent sur des marines, spécialité du peintre, mais aussi des représentations des tranchées qui rencontrent un fort succès commercial. D’autres tableaux de cette période représentent l’intérieur de la maison dite de la Duchesse Anne de Bretagne, remarquable par son escalier à vis arrimé à une colonne en chêne d’un seul tenant de 11 m, ornée de sculptures des saints protecteurs.À la fin de l’année 1920, Émile et son épouse quittent Morlaix et, malgré leur désir de retourner à Amiens, leur ville natale, se résignent à s’installer au Havre ou résident désormais leurs deux fils survivants. C’est dans cette ville du Havre qu’Émile peint ses dernières toiles et qu’il décède le , à 80 ans, dans son domicile loué au n° 10 de la rue du Docteur Lecadre. Il est inhumé dans le caveau de famille du cimetière de La Madeleine à Amiens.
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